Cette publication est une traduction de l’article « The One-Third-Rule: How To Take Control Of Your Chess Training » du GM Noël Studer : https://nextlevelchess.com/the-one-third-rule/
Beaucoup de joueurs qui cherchent à progresser aux échecs passent énormément de temps à réfléchir au « plan d’entraînement idéal ».
« Dois-je travailler les ouvertures, les tactiques ou les finales ? Et combien de temps dois-je consacrer à chacun ? », vous vous posez peut-être souvent la question.
Dans cet article, je souhaite vous présenter une méthode très simple pour répondre à ces interrogations. Je l’appelle la règle du tiers.

La règle du tiers suggère de diviser votre temps d’entraînement en trois parties égales :
- Un tiers : améliorer la vision tactique et la capacité de calcul
- Un tiers : jouer et analyser vos propres parties
- Un tiers : travailler les ouvertures, les finales ou le jeu positionnel, selon vos points forts et vos faiblesses
Comme l’a bien formulé Nate Solon, auteur spécialisé dans la progression aux échecs, cette règle élimine la peur de rater quelque chose (FOMO, Fear of Missing Out) et elle est extrêmement simple à appliquer.
Laissez moi vous expliquer pourquoi ce principe peut être intéressant pour vous.
La puissance de la règle du tiers
L’entraînement aux échecs peut parfois ressembler à un labyrinthe infiniment complexe, dans lequel on ne prend jamais le bon chemin.
Si vous avez cette impression, il est probable que vous passiez plus de temps à deviner quoi et comment vous entraîner qu’à réellement vous entraîner de manière efficace.
La simplicité
Pour éviter cela, il est essentiel de garder votre plan d’entraînement aussi simple que possible.
Une règle facile à retenir comme la règle du tiers est d’une aide précieuse.
Elle vous permet de suivre facilement votre progression et de vérifier si vous êtes sur la bonne voie.
Et si jamais vous déviez de votre plan, il vous suffit de planifier la semaine suivante en suivant de nouveau cette règle simple.
Éviter le FOMO (Fear of Missing Out : la peur de rater quelque chose)
Avoir un plan clair vous aide à éviter cette peur de manquer quelque chose.
Il existe aujourd’hui bien plus de cours, livres, articles et vidéos que vous ne pourrez jamais en étudier au cours d’une vie.
Si vous ne savez pas clairement ce que vous devez travailler, chaque nouveauté vous semblera alléchante. Vous finirez par toucher à un peu de tout… sans vraiment approfondir quoi que ce soit. Cela mène souvent à des plateaux de progression… voire à de la procrastination.

Grâce à la simplicité de cette règle, vous pouvez mettre en place rapidement un plan d’entraînement clair et vous y tenir. Une fois que vous savez que vous allez, par exemple, résoudre 1 heure de tactiques dans un livre précis chaque lundi,
vous ne perdrez plus votre temps à regarder dix vidéos YouTube dans l’espoir de tomber sur « la vidéo parfaite ».
Etudiez ce qui compte vraiment
La progression survient lorsque vous passez du temps sur ce qui compte vraiment. Cela s’applique aussi bien à l’entraînement tactique qu’au fait de jouer des parties d’entraînement et de les analyser ensuite.
Richard Teichmann a un jour déclaré :
« Les échecs, c’est 99 % de tactique. »
C’est sans doute un peu simplifié, mais il n’était pas si loin de la vérité.
La plupart des parties sont décidées par des tactiques.
Selon The Woodpecker Method, un excellent livre sur l’entraînement tactique, 42 % des parties de grands maîtres sont déterminées par des motifs tactiques.
Et plus le niveau est bas, plus ce chiffre augmente. Chez les joueurs classés entre 1800 et 2000 Elo FIDE, ce chiffre monte déjà à 72 % !
Si l’on descend encore en niveau, on s’approche du célèbre « 99 % » affirmé par Teichmann.
La tactique est donc absolument cruciale.
Mais alors, pourquoi jouer des parties et les analyser ?
Eh bien, si vous souhaitez améliorer vos résultats, vous devez être capable de montrer vos compétences en situation réelle.
Résoudre un exercice, ce n’est pas la même chose que de repérer une tactique pendant une partie.
En jouant et en analysant vos parties, vous vous préparez à reconnaître ces opportunités quand cela compte vraiment.
Comme vous le verrez plus tard, ce processus couvre tous les aspects du jeu, pas seulement la tactique :
- Vous améliorerez vos ouvertures,
- Vous découvrirez de nouvelles idées positionnelles,
- Et vous testerez vos compétences en finales.
Ce type d’entraînement « tout-en-un » rend les parties d’entraînement si efficaces. Mais uniquement si vous les analysez vraiment !
Limitez votre travail sur les ouvertures
La plupart des joueurs qui cherchent à progresser passent beaucoup trop de temps sur les ouvertures.
Ce n’est pas entièrement votre faute.
Le marketing de plusieurs sites d’échecs cherche à vous convaincre que :
« Si vous jouez simplement la même ouverture que untel ou untel, vous finirez par dépasser votre plafond de verre. »
Comme vous l’avez peut-être découvert à vos dépens, progresser aux échecs n’est malheureusement (ou heureusement !) pas si simple.
Grâce à la règle du tiers, vous consacrerez au maximum 33 % de votre temps précieux à l’étude des ouvertures.
Et cela sera largement suffisant.
Comme vous le verrez, il arrive même que vous n’ayez pas besoin de travailler les ouvertures du tout pour progresser considérablement.
Maintenant que je vous ai convaincu que la règle du tiers peut transformer positivement votre entraînement aux échecs, laissez-moi vous montrer comment l’appliquer de manière optimale.
1. L’entraînement tactique
Vous pouvez diviser l’entraînement tactique en deux parties :
- Apprendre les motifs tactiques
- Résoudre des exercices tactiques
La première étape se fait idéalement avec un bon livre ou un cours en vidéo.
Je recommande par exemple les cours Tactic Ninja et Mating Matador de ChessMood.
(Note du Traducteur : vous pouvez aussi explorer les différents motifs tactiques sur https://lichess.org/practice)
Une fois les bases acquises, l’essentiel est de vous tester régulièrement à travers des exercices et d’améliorer vos compétences progressivement.
Lorsque vous résolvez des exercices tactiques, respectez quelques règles simples :
- Notez toujours votre solution avant de jouer le coup ou de vérifier la solution dans le livre.
- Forcez-vous à prendre une décision, même si vous ne « résolvez » pas le puzzle après 10 minutes.
- Prenez le temps de comparer votre solution avec la solution correcte et identifiez ce qui n’a pas fonctionné.
Cet entraînement peut sembler un peu répétitif par moments, mais il est extrêmement efficace.
Si vous êtes prêt à le faire avec intensité et constance sur une longue période,
vous dépasserez largement ceux qui ne sont pas prêts à s’investir autant.
Progresser aux échecs n’est pas compliqué.
C’est juste parfois difficile… et pas toujours très amusant.
C’est pourquoi seuls quelques joueurs réussissent à franchir leurs plafonds de progression, tandis que la majorité reste frustrée, sans grands progrès.
2. Jouer et analyser
Merci de lire attentivement le paragraphe suivant.
Si vous le faites mal, vous risquez de perdre votre temps. Mais si vous le faites bien, cela devient à la fois amusant et extrêmement efficace pour progresser.
Évitez le tilt
(Note du traducteur : le tilt, c’est la perte du contrôle de ses émotions après une erreur ou une défaite, et la tendance à jouer impulsivement et souvent à enchaîner les mauvaises décisions.)

Chaque fois que vous jouez, vous devez veiller à éviter le tilt.
Le tilt est le pire résultat possible d’une session d’entraînement.
Il ne vous coûte pas seulement des points de classement, mais aussi de l’estime de soi et de la motivation.
Voici quelques conseils pour éviter le tilt :
- Ne jouez que lorsque vous êtes frais et reposé
- Définissez à l’avance le nombre de parties que vous allez jouer
- Faites une pause après une grosse erreur ou une défaite au temps
Quel cadence choisir pour s’entraîner ?
C’est ici que les choses deviennent plus techniques.
Le choix du contrôle de temps dépend de votre objectif (progrès général ou performance dans un format spécifique) et de votre niveau actuel.
Souhaitez-vous vous améliorer dans les parties classiques (OTB), rapides ou blitz ?
Voici quelques lignes directrices pour choisir un bon contrôle de temps :
- Les débutants doivent éviter les cadences plus rapides que 5+3
(vous avez besoin de temps pour réfléchir à vos décisions) - Si vous vous préparez pour des parties classiques, commencez par jouer en cadence rapide
(10+5 ou 15+10 sont d’excellents formats) - Plus vous voulez exceller dans une cadence rapide, plus vos parties d’entraînement peuvent l’être aussi
- Une partie d’entraînement ne devrait jamais être plus rapide que 3+0
(ce type de cadence est uniquement adapté aux Maîtres – 2400 Elo en ligne ou plus)
Comment analyser mes parties ?
C’est pendant l’analyse que se produit la véritable progression.
Je sais que beaucoup de joueurs n’analysent pas vraiment leurs parties…
Si vous débutez, gardez les choses aussi simples que possible, et améliorez progressivement votre méthode.
Avant de chercher à « bien analyser », commencez par prendre l’habitude d’analyser toutes vos parties.
Une fois que vous avez joué votre série (je recommande 2 à 6 parties, selon la cadence), repassez chaque partie et identifiez quelques moments clés :
- Fin de votre préparation en ouverture :
Quel a été le premier coup hors théorie ? Et que feriez-vous la prochaine fois dans cette position ? - Erreurs décisives :
À quel moment l’ordinateur montre-t-il un grand changement d’évaluation ? Surtout en blitz, un écart inférieur à +2 n’est pas si grave et peut être ignoré au début.
3. Comment définir le 3ème tiers ?
Pour faire simple, il est important de ne travailler qu’un seul domaine à la fois parmi les suivants : ouvertures, jeu positionnel, ou finales.
Souvenez-vous : un plan d’entraînement aux échecs ne fonctionne que si vous vous y tenez avec régularité.
Alors, comment décider ce qui est le plus important à travailler en ce moment ?
D’abord, demandez-vous si vous avez déjà acquis les bases dans chacun de ces domaines. S’il y a un écart de niveau important, commencez par travailler votre plus grande faiblesse !
Je sais : c’est plus agréable de travailler ce qu’on maîtrise déjà.
Mais justement, c’est ce que font la plupart des gens… et cela ne fonctionne pas si bien que ça. Alors faites preuve de courage et affrontez votre point faible.
Ensuite, choisissez une bonne ressource et concentrez-vous sur cette partie.
Quand vous aurez terminé, vous pourrez faire le point et passer à un autre domaine.
À l’attention des passionnés d’ouvertures :
Ne négligez pas complètement les finales et le jeu positionnel.
Vous ferez déjà l’essentiel du travail sur les ouvertures en analysant vos propres parties. Le reste peut attendre un peu, je vous le promets !
Encore une fois, gardez les choses aussi simples que possible : travaillez un seul des trois domaines à la fois.
Si vous voulez une véritable progression, vous devez apprendre à dire non à beaucoup de distractions. C’est ainsi que vous libérez du temps pour ce qui fait vraiment la différence.
4. Programmez votre entraînement
Pour vraiment rester sur la bonne voie avec votre entraînement aux échecs, planifiez votre entraînement chaque semaine. Notez à l’avance les jours précis, les horaires, les tiers (selon la règle du tiers) et les ressources que vous utiliserez.
Cela rend l’engagement beaucoup plus facile à tenir dans la durée.

Voici ce que vous devez faire :
- Définissez le temps total que vous souhaitez consacrer aux échecs chaque semaine
- Bloquez des créneaux horaires précis, par exemple :
« Mardi de 15 h à 16 h » au lieu de « 1 h le mardi » - Spécifiez ce que vous allez travailler exactement, par exemple :
« 30 min de résolution de puzzles sur Lichess, 15 min de vérification des solutions » au lieu de simplement « 45 min de tactiques »
Maintenant, il est temps de vous entraîner et de progresser ! Appliquez la règle du tiers à votre routine d’entraînement, et faites passer votre niveau aux échecs au niveau supérieur !

Une réponse à “Structurer son entraînement aux échecs : la règle des 3 tiers”
Perso je joue essentiellement pour le plaisir de jouer et comme je n’aime pas trop la stratégie et les finales, je suis plus sur la tactique et les parties ,tout en analysant mes défaites. Je ne me vois pas trop faire autrement.
Après je peux comprendre qu’il ya des méthodes plus efficaces.